Page:Petrone - Satyricon, trad. de langle, 1923.djvu/58

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peu de vertu pour s’en tenir aux simples impressions qu’elle fait sur l’esprit ?

Qualis nox fuit illa, Dii, Deœque !
Quam mollis torus ! Ilaesimus calentes,
Et transfudimus hinc, et hinc labellis
Errantes animas. Valete Curœ.
Mortalis ego sic perire cœpi
.

« Quelle nuit ; ô bons dieux ! quelle chaleur quels baisers ! quelle haleine ! quel mélange d’âmes en chaudes et amoureuses respirations »

« Quoique le style de déclamation semble ridicule à Pétrone, il ne laisse pas de montrer beaucoup d’éloquence en ses déclamations ; et pour faire voir que les plus débauchés ne sont pas incapables de méditation et de retour, la morale n’a rien de plus sérieux ni de mieux touché que les réflexions d’Encolpe sur l’inconstance des choses humaines et sur l’incertitude de la mort.

« Quelque sujet qui se présente, on ne peut ni penser plus délicatement, ni s’exprimer avec plus de netteté. Souvent, en ses narrations, il se laisse aller au simple naturel, et se contente des grâces de la naïveté ; quelquefois il met la dernière main à son ouvrage et il n’y a rien de si poli. Catulle et Martial traitent les mêmes choses grossièrement ; et si quelqu’un pouvait trouver le secret d’envelopper les ordures avec un langage pareil au sien, je réponds pour les dames qu’elles donneraient des louanges à sa discrétion.

« Mais ce que Pétrone a de plus particulier, c’est qu’à la réserve d’Horace en quelques odes, il est peut-être le seul de l’antiquité qui ait su parler de galanterie. Virgile est touchant dans les passions les amours de Didon, les amours d’Orphée et d’Euridice ont du charme et de la tendresse, toutefois il n’y a rien de galant ; et la pauvre Didon, tant elle avait l’âme pitoyable, devint amoureuse du pieux Enée au récit de ses malheurs. Ovide est spirituel et facile, Tibulle délicat cependant il fallait que leurs maîtresses fussent