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jules janin.

« Vous devriez dicter vos mémoires.

— Y pensez-vous ? » Et il se prit à rire joyeusement. « Mes mémoires, grand Dieu ! Je suis, mon cher ami, comme les peuples heureux : je n’ai point d’histoire. Lorsque je ne serai plus, si un homme de loisir et de bonne volonté juge à propos de narrer la vie de l’humble J. J., sa tâche, à coup sûr, ne lui demandera pas des années ! On pourrait se borner à écrire ceci : « Il rédigea fidèlement, pendant… supposons un demi-siècle !… le feuilleton des Débats, et il composa des Contes à la louange de la jeunesse aux dents blanches et des esprits en belle humeur. La goutte le tourmenta souvent ; mais, pour triompher de cette ennemie intime, il avait à ses côtés, Dieu merci ! une compagne intelligente et dévouée, et ses chers livres à portée de la main. »

Et il ajouta, après un court silence : « Quand on a toujours sincèrement honoré les lettres et que l’on possède des amis qui s’appellent Bossuet. Corneille, Molière, Diderot, Horace et Virgile, on est vraiment riche et digne