Aller au contenu

Page:Pierre-Jean De Smet - voyages aux Montagnes Rocheuses.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
83
AUX MONTAGNES ROCHEUSES

niers destinés au supplice. Les femmes viennent à leur rencontre en poussant des hurlements épouvantables, dans la supposition qu’elles auront à pleurer la mort de leurs maris ou de leurs frères. Un héraut proclame les détails circonstanciés de l’expédition ; on fait l’appel nominal des guerriers, et leur absence indique qu’ils ont succombé. Alors les cris perçants des femmes se renouvellent et leur désespoir présente une scène de rage et de douleur qui passe l’imagination. La dernière cérémonie est la proclamation de la victoire. Oubliant aussitôt leurs propres malheurs, elles s’empressent de célébrer le triomphe de leur nation ; et par une transition inexplicable, elles passent dans un instant du deuil le plus sombre à la joie la plus extravagante.

Je ne saurais trouver des paroles pour vous décrire les tourments qu’ils infligent au pauvre prisonnier voué à la mort : l’un lui arrache les ongles jusqu’à la racine, un autre lui mord la chair des doigts, fait entrer le doigt déchiré dans son calumet, et en fume le sang ; on leur écrase les doigts des pieds entre deux pierres ; on leur applique des fers rouges sur toutes les parties du corps ; on les écorche vifs, et on se repaît de leurs chairs palpitantes. Ces cruautés continuent pendant plusieurs heures, quelquefois pendant une journée entière, jusqu’à ce que la victime succombe à tant d’affreux tourments. Les femmes, comme de véritables furies, l’emportent souvent en cruauté sur