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VOYAGES

dire la plume d’une queue d’aigle, qu’ils regardent comme le symbole du guerrier. Cette plume, tantôt s’élève sur la tête et flotte en forme de panache, tantôt descend sur la nuque, quelquefois voltige autour des tempes. Pendant que nous fumions le calumet avec les principaux de la loge, je ne pouvais me lasser de considérer une espèce de dandy, qui se mirait sans cesse pour donner à son plumet la tournure la plus gracieuse, sans pouvoir atteindre au degré de perfection qu’il paraissait chercher. Le P. Point devint bientôt un objet d’attention et presque d’hilarité pour les enfants, à cause du peu de soin qu’il avait mis à se raser. Ainsi à leurs yeux, menton sans barbe, yeux sans cils et sans sourcils, tête sans cheveux, voilà autant de conditions de beauté essentielles. Mais ce n’est là qu’une partie de leur parure, et les peines qu’ils se donnent pour arriver à la perfection du genre sont vraiment inconcevables. Imaginez-vous donc cette tête sans poil, surmontée d’un plumet ; autour des yeux un cercle de vermillon ; sur tout le visage des sillons blancs, noirs ou rouges qui serpentent dans tous les sens ; aux oreilles, trouées de haut en bas, des pendants formés de morceaux de fer, d’étain, de faïence ou de porcelaine, qui se rabattent en grosses touffes et tintent sur les épaules ; au cou un collier de fantaisie qui tombe en large demi-cercle sur la poitrine ; au milieu de ce collier, un grand médaillon d’argent ou de cuivre ; aux bras et aux poignets des bracelets de laiton,