Page:Pierre-Jean De Smet - voyages aux Montagnes Rocheuses.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
132
VOYAGES

de ce singulier monument ; mais son existence n’en resterait pas moins un problème. Si quelque savant désire en donner la solution, qu’il se hâte de visiter la Cheminée ; car une crevasse qui la sillonne dans le haut, et qui bientôt, je pense, s’étendra jusqu’à la base, nous prédit que dans peu il n’en restera plus que le souvenir.

La Cheminée n’est pas la seule merveille qui se fasse remarquer dans cette vaste solitude. Parmi les plus curieuses, l’une est appelée la Maison, une autre le Château, une troisième le Fort, etc., et vraiment, si l’on ne savait qu’on voyage dans un désert où il n’existe absolument d’autre édifice que la tente qu’on dresse le soir et qu’on enlève le matin, on dirait que toutes les buttes comprises dans un espace d’environ cinquante milles sont autant de vieilles forteresses ou de châteaux gothiques ; avec un peu d’imagination et une teinture d’histoire, on se croirait transporté au milieu des antiques castels de la chevalerie errante. Ici, ce sont de larges fossés ; là, de hautes murailles ; ailleurs, des avenues, des jardins, des vergers ; plus loin, le parc, les étangs, la haute futaie ; vous croyez voir un de ces vieux manoirs du moyen âge. Aidez encore un peu à l’illusion, et le châtelain va vous apparaître sur ses lointains créneaux ; c’est bien lui, c’est sa voix que vous venez d’entendre dans le murmure confus des brises du désert Mais approchez, et, au lieu de ces antiquités imaginaires, vous ne