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Page:Pierre-Jean De Smet - voyages aux Montagnes Rocheuses.djvu/214

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VOYAGES

pents et de Soshocos ou Déterreurs de racines. Ils sont issus de la même souche, parlent la même langue, et se montrent amis des blancs. La seule différence que l’on puisse remarquer entre eux, c’est que les derniers sont les plus pauvres. Nous remarquâmes de temps en temps parmi eux ce véritable grotesque indien qu’on chercherait en vain ailleurs. Imaginez-vous une bande de chevaux, ou plutôt de misérables haridelles, hors de proportion dans tous leurs contours ; tâchez de vous les représenter empaquetés et comme enchâssés dans toutes sortes d’objets, de manière à leur donner une hauteur double, et puis surmontés par des êtres à forme humaine, vieux et jeunes, hommes et femmes, dans une variété de figures et de costumes telle, que les pinceaux d’un Teniers ou d’un Breughel auraient peine à les rendre avec fidélité. La charge de l’un de ces animaux, haut à peine de quatre pieds, était quatre gros ballots de viande sèche, deux de chaque côté pour se contrebalancer ; au-dessus étaient attachés horizontalement d’autres paquets, formant une plate-forme sur le dos de la bête ; et sur le sommet de tout cet échafaudage, à une élévation quelque peu périlleuse, un personnage très-vieux, assis à la turque, sur une peau d’ours et fumant son calumet. À ses côtés, sur une pareille rossinante, on voyait une vieille borgnesse, apparemment sa femme, accroupie dans la même attitude sur des ballots entassés contenant des racines amères, du