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D'UNE FEMME DU MONDE.

de le retrouver, de reprendre le cours interrompu de nos épanchements.

Et puis, quand je l’ai vu devant moi, ma joie est subitement tombée.

Une sorte de gêne inexprimable arrêta sur mes lèvres les paroles d’amour prêtes à s’échapper. Oui, j’avais honte, honte de moi même. Qu’allait-il penser de moi ? N’était-ce pas une preuve de ma faiblesse que je lui donnais en ce moment ? Moi, qui l’avais écarté, repoussé, qui lui avais dit de douter de lui-même, moi qui m’étais toujours posée à ses yeux comme une force supérieure, inattaquable.

Ah ! comme il lui était facile de rire et de se moquer de moi !

Et ces paroles, qui me rappelaient les dangers que j’avais courus, auxquels j’avais su échapper, chantèrent alors dans ma mémoire :

— Si loin que je sois, je serai toujours près de vous. À n’importe quel moment, à n’importe quelle heure de votre vie, il vous suffira de dire un mot, de faire un signe, je viendrai.

J’avais dit le mot, j’avais fait le signe, il était venu. Lui, il avait tenu sa promesse, et moi, j’avais été incapable de poursuivre ma