Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
237
D'UNE FEMME DU MONDE.

craquèrent et qu’un cri, un cri de douleur et de rage, s’échappa de ma gorge :

— Non, vous ne m’aurez pas ! hurlais-je. Lâche !… Lâche !…

Ses membres frémissaient ; dans ses yeux passaient par instant comme des lueurs de sang. Il cherchait à approcher son visage du mien et je sentais sur mes lèvres courir son haleine chaude et haletante.

Alors, pour l’éviter, je rejetai violemment la tête en arrière : dans ce mouvement brusque, mes pieds glissèrent et je tombai à la renverse, l’entraînant dans ma chute.

Un instant, ce fut à terre une lutte acharnée, horrible, brève, hélas ! Lui, le désir décuplait ses forces ; moi, la frayeur, la terreur m’anéantissaient.

Alors, me sentant perdue, je me fis suppliante :

— Grâce ! grâce !.. Au nom du ciel, grâce !…

Pour toute réponse, sa bouche se colla sur la mienne, avide, ivre, et là, à terre, parmi les chaises et les verres brisés, je subis l’outrage le plus épouvantable que peut subir une femme.