Page:Pierre Duhem - Les Origines de la statique, tome premier, 1905.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 57 —

inégale, c’est-à-dire de temps et de mouvement inégaux, ou de poids inégal. Et le désir du premier moteur ayant cessé, aussitôt cessera le second. »

Ce sont ces pensées de Léonard que Cardan résume lorsqu’aux livres De la Subtilité, « il démontre que le mouvement n’est perpétuel en toutes choses[1]. » Lorsque l’on tente de réaliser un perpétuel mobile, « ce que l’on demande à proprement parler, c’est ceci : existe-t-il un mouvement qui en lui-même, et en dehors de toute génération nouvelle, renferme une cause capable de le perpétuer ? Le problème serait résolu si l’on possédait des horloges qui, au lieu de mettre en branle ce mouvement qui annonce les heures en frappant des coups, remonteraient les poids en haut de leur course. Or, les mouvements qui peuvent ébranler les graves sont de trois sortes seulement : ou bien ils tendent essentiellement au centre du monde ; ou bien ils ne sont pas simplement dirigés vers le centre, comme l’écoulement des eaux ; ou bien ils découlent d’une nature particulière, comme le mouvement du fer vers l’aimant. Il est constant que le mouvement perpétuel doit être cherché parmi les mouvements des deux premiers genres[2]. Or, lorsqu’un poids est tiré plus

  1. Cardan, Les Livres de la Subtilité, traduis de latin en françois par Richard le Blanc. Paris, l’Angelier, 1556, p. 339. Les citations qui suivent sont traduites directement du texte latin et non pas tirées de la traduction de Richard le Blanc, fort obscure en ce passage.
  2. On remarquera que Cardan évite de se prononcer sur la possibilité d’engendrer le mouvement perpétuel à l’aide d’aimants. Les propriétés si étranges des aimants préoccupaient singulièrement, à cette époque, ceux qui espéraient réaliser un perpetuum mobile. En 1558, Achille Grasser imprimait pour la première fois à Augsbourg, d’après une des nombreuses copies manuscrites qui circulaient parmi les physiciens, l’écrit célèbre composé par Pierre de Maricourt (Petrus Peregrinus), dans le camp de Charles d’Anjou, devant Lucera, le 8 août 1269. En cet écrit (a), Pierre de Maricourt, après avoir établi les lois des actions magnétiques en logicien rompu à la méthode expérimentale, essaye de produire un perpetuum mobile à l’aide d’aimants.
    (a) Pétri Peregrini Maricurtensis, De magnete, seu rota perpetui mobilis libellus Divi Ferdinandi Rhomanorum imporatoris auspicio per Achillem P. Grasserum L. num primum promulgatus Augsburgi in Suevis, Anno Salutis 1558. — Cet ouvrage est réimprimé dans : Neudrucke von Schriften und Karten über Meteorologie und Erdmagnetismus, herausgegeben von G. Hellmann. N° 10, Rara magnetica. Berlin, 1896.