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CHAPITRE VII.


CHAPITRE VII.

POÉSIE ÉLÉGIAQUE ET POÉSIE ÏAMBIQUE.


Origine de l'élégie. — Récitation élégiaque. — Callinus. — Tyrtée. — Archiloque. — Simonide d'Amorgos. — Le Margitès.

Origine de l’élégie.


Le mot élégie n’avait pas, chez les Grecs, le sens restreint que nous lui donnons. Il s’appliquait à des chants de nature infiniment diverse, et qui n’avaient de commun que le mètre dans lequel ils étaient écrits. Toute pièce de vers, quels qu’en fussent le sujet et la dimension, où le pentamètre alternait avec l’hexamètre, était une élégie. Le nom propre du pentamètre était ἔλεγος, élége, comme ἔπος était celui de l’hexamètre : « Les vers accouplés de longueur inégale, dit Horace[1], servirent d’abord à l’expression de la plainte, puis à celle du contentement. Mais quel fut l’inventeur des courts éléges, c’est sur quoi les grammairiens disputent, et le procès est encore pendant. » Il est probable en effet qu’à l’origine, l’élégion, comme on disait, ou le vers double, le distique, comme on disait encore, avait été particulièrement employé dans des chants de douleur et des lamentations. Le mot élégie vient, selon les uns, de deux mots qui signifient dire hélas ! ἔ λέγειν, et, selon les autres, du mot qui signifie pitié, ἔλέος. Mais il ne reste rien des premiers essais de l’élégie, et les plus anciens monuments connus de la poésie élégiaque nous montrent déjà le pentamètre en possession de tous ses privilèges, et non point borné à l’expression de la plainte ou même à celle du contentement. Callinus et Tyrtée ne chantent point leurs chagrins ni leurs joies : ils chantent pour réveiller dans le cœur des hommes l’amour de la

  1. Art poétique, vers 75 et suivants.