Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/242

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né le système de l’univers, du moins pour quelque temps, n’étoit pas regardé comme capable de tout par ceux mêmes qui s’honoroient de l’avoir pour compatriote.

Guillaume III, qui se connoissoit en hommes, étoit embarrassé sur une affaire politique ; on lui conseilla de consulter Newton : Newton, dit-il, n’est qu’un grand philosophe. Ce titre étoit, sans doute, un éloge rare ; mais enfin, dans cette occasion-là, Newton n’étoit pas ce qu’il falloit, il en étoit incapable, et n’étoit qu’un grand philosophe. Il est vraisemblable, mais non pas démontré, que, s’il eût appliqué à la science du gouvernement les travaux qu’il avoit consacrés à la connoissance de l’univers, le roi Guillaume n’eût pas dédaigné ses conseils.

Dans combien de circonstances, sur combien de questions, le philosophe n’eût-il pas répondu à ceux qui lui auroient conseillé de consulter le monarque : Guillaume n’est qu’un politique, un grand roi.

Le prince et le philosophe étoient également capables de connoître les limites de leur génie ; au lieu qu’un homme d’imagination regarderoit comme une injustice d’être récusé sur quelque matière que ce pût être. Les hommes de ce caractère se croient capables de tout ; l’inexpérience