Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/275

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tains inventeurs ; il y a eu plusieurs divinités dans le paganisme qui n’ont pas eu d’autre origine.

À l’égard des arts de pur agrément, et dont toute l’utilité consiste dans les plaisirs qu’ils procurent, dans quel ordre d’estime les rangeons-nous ? N’est-ce pas suivant les degrés de plaisir et le nombre des hommes qui peuvent en jouir ?

Il y a peu d’arts auxquels les hommes en général soient plus sensibles qu’à la musique ; et le plaisir qu’elle leur fait dépendant de l’exécution, il semble qu’ils devroient préférer ceux qui exécutent les pièces à ceux qui les composent ; mais, d’un autre côté, les compositeurs sont les plus rares, et leur utilité est plus étendue. Leurs compositions peuvent se transporter partout, et y être exécutées ; au lieu que le talent de l’exécution, quelque supérieur qu’il puisse être, se trouve borné au plaisir de peu de personnes, du moins en comparaison du compositeur.

La rareté d’une chose sans aucune espèce d’utilité ne peut mériter d’estime. Celui qui lançoit des grains de millet au travers d’une aiguille, étoit vraisemblablement unique ; mais cette adresse n’étoit d’aucune utilité ; la curiosité qu’il pouvoit exciter n’étoit pas même une curiosité de plaisir. Il y a des choses qu’on veut voir, non par le plaisir qu’elles font, mais pour savoir si elles sont.