Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/167

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dusse qu’à une espèce d’importunité les caresses qu’elle me souffroit, je croyois m’apercevoir que la pudeur s’y opposoit plus que tout autre motif. Je la pressai d’achever mon bonheur ; elle me conjura de ne rien exiger d’elle qui fût contraire à ses devoirs. Elle me dit que son cœur, dont j’étois sûr, devoit me suffire, et que je lui étois trop cher pour qu’elle risquât de me perdre. Je vis que mes empressemens m’affligeoient ; je n’insistai pas davantage, et je la quittai après en avoir reçu toutes les assurances de l’amour le plus tendre.

Le temps qui me restoit jusqu’au départ, m’étoit trop précieux pour ne le pas donner tout entier à madame de Selve. Je passois tous les jours avec elle ; nos entretiens ne rouloient que sur notre amour, la rigueur des devoirs et la nécessité de les remplir. Je trouvois toujours en madame de Selve la même tendresse et les mêmes charmes. Bien loin que je pusse rester dans la réserve qu’elle exigeoit, je sentois que mes désirs l’enflammoient de plus en plus. Je recommençai à la presser ; je lui jurai que mon cœur lui étoit trop inviolablement attaché, qu’elle étoit devenue trop nécessaire au bonheur de ma vie, à ma propre existence, pour qu’elle dût craindre mon inconstance. Elle voulut me rappeler à mon respect pour elle ; mon amour étoit