Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/22

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mière démarche, me pria de la venir revoir, en m’assurant qu’elle n’avoit d’autres motifs que son amitié pour moi. Je revins chez la marquise fort différent de ce que je m’y étois trouvé jusques alors ; elle s’en aperçut, elle en fut alarmée. Les sentimens de la marquise ne me touchoient plus ; Je ne sentois que l’ennui et le dégoût d’un plaisir uniforme. J’allois souvent chez madame de Rumigny, qui suivoit constamment son projet ; je sentis bientôt pour elle tout ce que m’avoit d’abord inspiré madame de Valcourt, c’est-à-dire des désirs. L’expérience que j’avois déjà acquise, me rendit pressant ; mais, avant de se rendre, madame de Rumigny me dit : Je veux le sacrifice de la marquise ; j’exige le plus éclatant, et tel que je le prescrirai ; notre rupture a trop fait d’éclat, ma vengeance ne doit pas être ignorée. Je voulus lui faire quelques représentations ; mais elle me dit qu’elle ne me verroit jamais, si je balançois un moment. Je fus bientôt déterminé ; je consentis à tout, je renvoyai à la marquise ses lettres et son portrait, avec un billet qui, je crois, étoit fort impertinent, puisqu’il étoit dicté par madame de Rumigny ; en un mot, je quittai madame de Valcourt on ne peut pas plus mal. Ce ne fut cependant pas sans remords : c’est en vain qu’on veut s’aveugler pour séparer la probité du commerce des femmes. J’avois