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DÉMODOCUS.


qu’heureuse ; et dans le second, après de vaines discussions on n’arrive qu’au malheur.


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J’entendais un homme reprocher a son ami d’avoir ajouté foi à son accusateur et de n’avoir prêté l’oreille qu’à ses discours, sans se soucier de la défense qu’on voulait lui présenter. Il lui disait que c’est une mauvaise action que de condamner un homme sans l’entendre, sans entendre ses amis, qui peuvent avoir d’excellentes raisons à donner, et de se fier légèrement à une accusation avant d’avoir entendu les deux côtés ; qu’il est juste de connaitre l’apologie aussi bien que l’accusation, avant de louer ou de blâmer. Comment peut-on prononcer une sentence juste et juger suivant les formes, sans entendre les deux parties ? Car il faut prononcer entre les discours de chaque côté comme entre l’or et le porphyre. Dans quel but donnerait-on aux deux parties le temps de se défendre ; dans quel but forcerait-on les juges à promettre avec serment de les écouter également, si le législateur n’avait pensé qu’avec ces précautions la sentence du tribunal serait plus juste et mieux rendue ? Mais pour toi, il semble que tu n’aies jamais entendu parler de ce principe familier à tout le monde. — Quel principe ?

Ne juge pas avant d’avoir entendu les deux côtés.

Ce principe ne serait pas si répandu, s’il n’était bon et convenable. Je te conseille donc à l’avenir de ne pas blâmer et louer si légèrement.

L’autre répondit qu’il lui paraissait absurde, si l’on ne pouvait distinguer le mensonge de la vérité en entendant un seul, qu’on le put davantage quand on en entendrait deux. On ne peut s’éclairer en entendant seulement celui qui dit vrai, et si après lui, on entend