Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, XI, XII et XIII.djvu/941

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le spectacle du jour. De l'aspect du jour l'homme passe à celui de la nuit, qui lui offre un tableau [978d] tout différents; et, ne cessant de ramener la révolution successive des jours et des nuits, le ciel ne cesse point d'enseigner aux hommes ce que c'est qu'un et deux, jusqu'à ce que le plus stupide ait suffisamment appris à compter; car cette même suite de jours et de nuits apprend aussi à chacun de nous ce que c'est que trois, quatre et plusieurs. De plus, entre les corps célestes, Dieu en a fait un, c'est la lune, qui, dans sa course, paraissant tantôt plus grande, tantôt plus petite, nous montre sans cesse [978e] une nouvelle espèce de jour, pendant l'espace de quinze jours et de quinze nuits ; telle est la mesure de sa révolution, si on veut en ajouter ensemble toutes les parties pour en faire un cercle : de sorte que le plus stupide de tous les animaux que Dieu a doués de la faculté d'apprendre conçoit enfin ce que c'est que le nombre. Jusque-là, et tant qu'il ne sera question que de considérer chaque nombre séparément, tout animal qui a l'intelligence nécessaire deviendra habile dans cette science. [979a] Mais il faut, ce me semble, un plus grand effort d'esprit pour combiner ensemble divers nombres : c'est pourquoi Dieu ayant fait, comme je l'ai dit, la lune sujette à croître et à décroître, nous montra par là le rapport des mois aux années[1], et nous mit heureusement sur la voie de comparer un nombre avec un autre. De là aussi nous sont venus les fruits et la fécondité de la terre, qui donne à tous les animaux leur nourriture, à l'aide des vents et des pluies distribués à propos et avec mesure. Si quelquefois [979b] cet ordre est changé et altéré, ce n'est point Dieu qu'il faut accuser,

  1. Il s'agit des mois lunaires, les premiers dont on ait fait usage. En grec le mot mois, μήν, vient de μήνη, lune.