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ALCIBIADE

Alcibiade. — Ce que tu dis, Socrate, me semble vrai.

Socrate. — Concluons que rien de ce qui est beau n’est mauvais, en ce qui fait sa beauté, que rien de ce qui est laid n’est bon en ce qui fait sa laideur.

Alcibiade. — b Cela me paraît clair.

Socrate. — Autre considération, encore. Faire une belle action, n’est-ce pas se bien conduire[1] ?

Alcibiade. — Oui.

Socrate. — Or ceux qui se conduisent bien ne sont-ils pas heureux ?

Alcibiade. — Comment en douter ?

Socrate. — Ils le sont par le bien qui est en eux ?

Alcibiade. — Parfaitement.

Socrate. — Et ce bien est en eux parce que leur conduite est bonne et belle !

Alcibiade. — Oui.

Socrate. — Donc se bien conduire est bon.

Alcibiade. — Sans aucun doute.

Socrate. — Et la bonne conduite est belle.

Alcibiade. — Oui.

Socrate. — c De nouveau donc, il nous est démontré que le beau et le bien sont une même chose.

Alcibiade. — Apparemment.

Socrate. — En conséquence, quand nous trouverons qu’une chose est belle, nous trouverons par là même qu’elle est bonne.

Alcibiade. — La conséquence s’impose.

Socrate. — Mais ce qui est bon n’est-il pas avantageux ?

Alcibiade. — Si.

Socrate. — Te rappelles-tu maintenant ce que nous avons reconnu vrai au sujet du juste ?

Alcibiade. — C’était, je crois, que les actions justes sont belles.

Socrate. — Et, par là même, que les actions belles sont bonnes.

Alcibiade. — Oui.

Socrate. — d Et que ce qui est bon est avantageux.

  1. La locution grecque qui se traduit littéralement par « se bien conduire » signifiait dans l’usage « être heureux ». Cf. Notice, p. 55.