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HIPPIAS MINEUR

Hippias. — Plus que personne, Socrate.

Socrate. — Par exemple, si quelqu’un te demandait combien font trois fois sept cents, tu donnerais plus vite et mieux que personne, si tu le voulais, d le produit exact ?

Hippias. — Justement.

Socrate. — N’est-ce pas parce que, en cette matière, tu es le plus capable et le plus habile[1] ?

Hippias. — Oui.

Socrate. — Est-ce assez dire ? n’es-tu pas aussi le meilleur là où tu es le plus capable et le plus habile, dans l’arithmétique ?

Hippias. — Certes, j’y suis le meilleur, Socrate.

Socrate. — Ainsi tu serais le plus capable de dire la vérité en cette matière, n’est-ce pas ?

Hippias. — Je le pense, en effet.

Socrate. — e Et de tromper sur le même sujet ? allons, réponds-moi comme tu l’as fait jusqu’ici, bravement et hardiment, Hippias. Si quelqu’un te demandait combien font trois fois sept cents, n’est-ce pas toi qui pourrais le mieux le tromper et soutenir une affirmation fausse sans varier, si tu voulais mentir et ne jamais répondre ce qui serait vrai ? ou, au contraire, serait-ce l’ignorant en cette matière qui pourrait tromper mieux que toi, si tu le voulais ? 367 ne crois-tu pas que cet ignorant, tout en voulant mentir, dirait parfois la vérité sans le vouloir et par hasard, faute de savoir, tandis que toi, l’homme habile, si tu voulais mentir, tu mentirais sans varier ?

Hippias. — C’est vrai ; tu as raison.

Socrate. — Maintenant, peut-on tromper en toute chose, sauf en arithmétique, et ne saurait-on tromper à propos de nombres ?

Hippias. — Par Zeus, à propos de nombres tout aussi bien.

Socrate. — Admettons donc, Hippias, qu’il peut exister quelque b homme qui soit trompeur en fait de nombres et de calcul.

  1. Hippias semble avoir été effectivement un mathématicien habile. Proclos (Comm. sur le ier Livre des Éléments d’Euclide, éd. Friedlein, 272, 7 et 356, 11) nous apprend qu’il s’occupa notamment du problème de la quadrature du cercle et croyait pouvoir le résoudre au moyen d’une courbe de son invention.