comment, un peu de répit quant au boire. Aussi bien suis-je moi-même de ceux qui hier s’en sont mis par dessus la tête !” Sur ce, paraît-il, le fils d’Acoumène, Éryximaque, intervint après les avoir entendus : “Parfait, dit-il, l’idée est bonne ! Et il y en a, parmi vous, un autre encore que je voudrais entendre : pour la résistance à la boisson, comment te sens-tu, Agathon ? — Elle est nulle, répondit celui-ci : moi non plus je ne suis pas en force ! — La bonne aubaine, c selon toute apparence, s’écria Éryximaque, ce doit être pour nous, aussi bien pour moi que pour Aristodème, pour Phèdre, pour ces gens-ci, que maintenant vous autres, les plus forts buveurs, vous ayez abdiqué ! Car nous ne sommes jamais de taille ! Socrate, lui, je le mets hors de cause : il est également bon dans les deux genres et il aura toujours son compte, que nous nous comportions d’une manière ou de l’autre[1] ! Ainsi, je ne me trompe pas, aucun de ceux qui sont ici n’a grande envie de boire du vin en quantité : aussi, en m’entendant parler de l’ivresse et de sa nature, la vérité de mon langage vous sera-t-elle sans doute moins déplaisante. Pour moi, s’il est une conviction que d m’ait, je crois, donnée l’exercice de la médecine, c’est bien celle du mal que l’ivresse fait à l’homme ; et je ne voudrais, ni pour mon compte pousser trop loin la beuverie, ni le conseiller à d’autres, surtout quand on a encore la tête lourde de la veille !” Il fut alors, au dire d’Aristodème, interrompu par Phèdre de Myrrhinonte : “Ah ! bien, dit celui-ci ; moi, j’ai l’habitude de t’en croire, surtout quand c’est de médecine que tu parles. Ainsi feront aussi les autres aujourd’hui, à condition qu’ils soient raisonnables[2] !” Ces paroles de Phèdre obtinrent e un assentiment unanime : au lieu d’employer à s’enivrer la réunion de ce jour, on se réglerait pour boire sur le seul agrément.
- ↑ Ceci est illustré par le discours d’Alcibiade, 220 a. Cf. 223 d.
- ↑ Phèdre ménage sa santé, et le ton doctoral d’Éryximaque impose à cet esprit, docile à toute autorité magistrale. Avec son médecin il fuira sagement l’orgie (223 b), et l’un des premiers.
avantage, ici Agathon et Socrate à l’égard du savoir (cf. les lignes précédentes). Juge du concours théâtral, Dionysos, dieu du vin, le sera donc aussi de la compétition des buveurs. Voir 199 c sqq. le débat entre Socrate et Agathon, qui se poursuit dans l’entretien avec Diotime. Cf. Notice p. xxx.