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LE BANQUET

hommes qui sont une coupure de cet être mixte auquel, je vous l’ai dit, on donnait alors le nom d’androgyne, sont tous amoureux des femmes, et c’est de ce genre que proviennent la plupart des adultères ; c’est pareillement e de ce genre que proviennent à leur tour toutes les femmes qui aiment les hommes et les femmes adultères. Quant à celles d’entre les femmes qui sont une coupure de femme, celles-là ne prêtent pas aux hommes la moindre attention ; c’est bien plutôt au contraire vers les femmes que les tourne leur inclination, et voilà le genre d’où sont originaires les petites amies de ces dames ! Quiconque enfin est une coupure de mâle recherche les mâles : aussi longtemps qu’il est un jeune garçon, celui-là, en sa qualité de tranche en miniature du mâle originel, aime les hommes ; il a du plaisir à coucher avec les hommes, à 192 s’enlacer à eux. Parmi les enfants et les adolescents il n’y en a pas de plus distingués, parce qu’ils ont une nature au plus haut degré virile. Il se trouve à la vérité des gens pour dire que ce sont des impudiques : erreur, car ce n’est pas par impudicité qu’ils agissent ainsi, mais au contraire parce qu’ils sont résolus, qu’ils ont le cœur d’un homme et l’allure d’un mâle, empressés à rechercher ce qui leur ressemble. Or rien ne le signale plus fortement que ceci : c’est que, leur formation achevée, les individus de cette espèce sont seuls à se révéler hommes par leurs aspirations politiques. Une fois parvenus à l’âge viril, ce sont les garçons qu’ils aiment ; à l’égard du mariage et de la paternité ils ont une naturelle b indifférence, qui en eux ne cède qu’à l’autorité de l’usage ; ce qui ne les empêche pas de trouver aussi leur compte à passer côte à côte leur vie dans

    son sens propre s’est perdu en français, tandis que pour nous la tessera latine évoque une image plus concrète. Essentiellement il s’agit d’une tablette, d’un cube, d’un osselet (193 a), dont deux hôtes gardaient chacun la moitié, transmise ensuite aux descendants ; en rapprochant l’une de l’autre (c’est l’étymologie) ces deux fractions complémentaires de l’entier, on établissait l’existence de liens antérieurs d’hospitalité. Le symbole est donc un signe de reconnaissance, manifestation d’une solidarité de droit. Quant à l’autre image, c’est celle de tous les poissons (soles, carrelets, plies, limandes, etc.) qui ont les deux yeux sur le dessus et d’un même côté de la tête, et au ventre desquels, comme à une section médiane, s’ajusterait un pareil demi-poisson ; cf. Aristophane, Lysistratè, 115 sq.