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LE BANQUET

Ainsi, promesse de la langue, non pas de la pensée[1] ! Bonsoir donc ! ce n’est plus en effet ma façon de célébrer les louanges, et je ne m’en tirerais pas. Pourtant, s’il s’agit cette fois de vérités, je veux bien parler, si vous le désirez, b comme je sais et non pour rivaliser avec votre éloquence : je ne tiens pas à faire rire à mes dépens ! Vois donc, Phèdre, si besoin est encore d’un discours de cette sorte et qui fasse entendre au sujet de l’Amour des paroles de vérité, mais où, d’autre part, le vocabulaire et la disposition des phrases seront ce qu’ils seront, et comme d’aventure il se pourra qu’ils me viennent.”


Deuxième partie :
La conception philosophique de l’Amour.

« Là-dessus, contait Aristodème, Phèdre et les autres l’invitèrent à parler en s’exprimant comme il croirait le devoir faire. “Eh bien ! dit Socrate, une chose encore, Phèdre : laisse-moi questionner Agathon sur quelques points, afin que l’assentiment que j’aurai obtenu de lui[2] c me permette désormais de parler. — Mais oui ! je te laisse faire, répondit Phèdre : tu n’as qu’à l’interroger.” Sur ce, voici, d’après mon narrateur, quel fut à peu près le début de Socrate : Discussion préliminaire avec Agathon. À coup sûr, Agathon, tu as bien fait à mon sens de donner pour préambule à ton discours cette idée, que la première chose à faire au sujet de l’Amour était de montrer quelle est sa nature, et, par après, quelles sont ses œuvres : voilà un exorde que j’admire fort ! Poursuivons donc, je te prie ; et en ce qui concerne l’Amour, puisqu’au surplus tu t’es expliqué sur sa nature d’une façon belle et grandiose, d dis-moi ceci encore[3] : « Est-ce que sa nature est telle que l’Amour soit amour de quelque chose, ou n’est-il amour de rien ? » Ce que je te demande, ce n’est pas si c’est à l’égard de tels mère ou père ; car ce serait une question risible, de demander si l’Amour est amour à l’égard d’une mère ou d’un père. Mais le cas est analogue à celui où, envisageant

  1. Vers d’Euripide, souvent cité, Hippolyte 612.
  2. Condition du progrès dialectique ; cf. 200 e s. fin. et Phédon p. 12, 2 ; 58, 1 ; 60, 4.
  3. Sur ce qui suit jusqu’à la fin de e, voir Notice, p. lxxiii sq.