Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 2.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
228 d
65
HIPPARQUE OU L’HOMME CUPIDE

eux des Hermès[1] sur les routes entre la ville et les différents dèmes ; puis, dans le trésor de ses propres connaissances, celles qu’il avait apprises et celles qu’il avait découvertes, choisissant les pensées qu’il jugeait les plus sages, il les mit lui-même en vers élégiaques et fit graver ses poèmes comme documents de sa sagesse : ainsi, tout d’abord, ses concitoyens n’auraient plus à admirer eles sages inscriptions du temple de Delphes, comme « Connais-toi toi-même », « Pas d’excès » et d’autres de ce genre, mais ils estimeraient plus sages les préceptes d’Hipparque ; de plus, dans leurs allées et venues, lisant ses maximes de sagesse et y prenant goût, ils multiplieraient leurs visites afin de compléter leur instruction. Il y avait deux inscriptions : sur celle du côté gauche de chaque Hermès, 229une inscription fait dire à Hermès qu’il est situé entre la ville et le dème ; sur celle du côté droit, il proclame :

Ceci est un monument d’Hipparque : marche dans des sentiments de justice.

Bien d’autres belles sentences encore sont gravées sur d’autres Hermès. En voici une qui se trouve sur la voie Stiriaque. On y dit :

bCeci est un monument d’Hipparque : ne trompe pas ton ami.

Donc, puisque tu es mon ami, je n’oserais jamais te tromper ni désobéir à un si grand homme. Après sa mort, les Athéniens subirent trois ans le régime tyrannique de son frère Hippias ; les anciens t’apprendraient que ce furent les trois seules années de tyrannie à Athènes ; le reste du temps, les Athéniens vécurent presque comme sous le sceptre de Kronos.

cDes gens instruits racontent aussi, au sujet de sa mort, qu’elle n’eut pas pour cause ce qu’on s’imaginait générale-

    dans le lyrisme proprement dit. Il connaît tout, s’intéresse à tout : on lui attribuait l’invention de la mnémotechnie, l’introduction de lettres nouvelles dans l’alphabet. C’est un homme de sagesse pratique et de raison, un conseiller écouté des puissants… » (Croiset, l. c., p. 346 et suiv.).

  1. Les Hermès étaient des statues dont la tête seule et quelquefois le buste, étaient sculptés ; le reste formait un poteau nu, à quatre faces. Des piliers de ce genre étaient employés à plusieurs fins, v. g. comme poteaux indicateurs, comme ornements…