Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 3.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
392 c
92
ÉRYXIAS

irriter davantage et les rendraient souverainement insupportables. Ils viennent de nous envoyer des ambassadeurs, mais je crois bien que c’est pour tendre dquelque embûche à notre cité ».

Tandis que nous causions[1], voici que les ambassadeurs passèrent. Alors, Érasistratos me montrant l’un d’entre eux, me dit : « Tiens, celui-là, Socrate, c’est le plus riche des Siciliens et des Italiens. Comment ne le serait-il pas, poursuivit-il, lui qui possède une telle étendue de terrain qu’il lui serait facile, s’il voulait, de faire des labours d’une étendue immense ! On n’en trouverait certainement pas une pareille dans toute la Grèce. De plus, ses autres richesses sont considérables, esclaves, chevaux, or, argent… » Comme je le voyais lancé à pérorer 393sur la fortune de cet homme, je lui demandai : « Eh bien ! Érasistratos, pour quelle sorte d’homme passe-t-il en Sicile ? » — « Lui, dit-il, il passe pour le plus scélérat des Siciliens et des Italiens, et il l’est plus que tous, d’autant plus scélérat qu’il est plus riche. Aussi, demande à n’importe quel Sicilien quel homme, à son avis, est le plus scélérat et le plus riche, personne ne t’en désignera un autre que lui ».


Première thèse.

M’apercevant qu’il mettait la conversation sur un sujet qui n’était pas de médiocre importance, puisqu’il s’agissait des questions qui passent pour les plus graves, c’est-à-dire la vertu et la richesse, je lui demandai lequel bdes deux hommes lui semblait le plus riche, celui qui se trouve avoir des talents d’argent, ou celui qui possède un champ d’une valeur de deux talents. — « C’est, je pense, répondit-il, celui qui possède le champ ». — « Donc, repris-je, d’après ce même raisonnement, si quelqu’un avait des vêtements, des tapis, ou d’autres objets de plus de valeur encore que tout ce que possède cet étranger,

    toutefois le personnage est historique, c’est qu’il est apparenté à Critias (396 d). — Sur les autres interlocuteurs de Socrate, cf. la notice, p. 79.

  1. Schrohl (op. cit., p. 12) fait remarquer les ressemblances qui existent entre l’Éryxias et le Charmide, au point de vue de la composition. Ici, la transition amenant le sujet du dialogue rappelle fort celle qui introduit dans le Charmide le thème de la discussion. Voir 154 b : Καὶ ἅμα ταῦτ' αὐτοῦ (τοῦ Κριτίου) λέγοντος, ὁ Χαρμίδης εἰσέρχεται.