Page:Platon - Sophiste ; Politique ; Philèbe ; Timée ; Critias (trad. Chambry), 1992.djvu/236

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et de toute espèce de chasse, et de la peinture ou de toute autre partie de l’imitation en général, de la charpenterie et de la fabrication d’ustensiles de toute espèce, ou de l’agriculture, ou de toute l’horticulture ; si nous devions voir pratiquer suivant des règles écrites l’élevage des chevaux ou l’art en général de soigner les troupeaux, ou la divination, ou toutes les parties qu’embrasse l’art de servir, ou le jeu du trictrac, ou la science des nombres tout entière, soit pure, soit appliquée aux surfaces planes, aux solides, aux mouvements, que deviendraient tous ces arts ainsi traités et réglés sur des lois écrites, au lieu de l’être sur l’art ?

SOCRATE LE JEUNE

Il est évident que c’en serait fait pour nous de tous les arts et qu’ils ne renaîtraient plus jamais, par suite de cette loi qui interdit la recherche ; et la vie, déjà si dure à présent, deviendrait alors absolument insupportable.

L’ÉTRANGER

XXXIX. — Et ceci, qu’en diras-tu ? Si nous exigions que chacun des arts que j’ai nommés fût asservi à des règlements et que le chef désigné par l’élection ou par le sort veillât à leur exécution, mais que ce chef ne tînt aucun compte des règles écrites et que, par amour du gain ou par une complaisance particulière, il essayât d’agir autrement qu’elles ne le prescrivent, bien qu’il ne sût rien, ne serait-ce pas là un mal encore plus grave que le précédent ?

SOCRATE LE JEUNE

C’est très vrai.

L’ÉTRANGER

Il me semble, en effet, que, si l’on enfreint les lois qui ont été instituées d’après une longue expérience et dont chaque article a été sanctionné par le peuple sur les conseils et les exhortations de conseillers bien intentionnés, celui qui y contrevient commet une faute cent fois plus grande que la première et anéantit toute activité plus sûrement encore que ne le faisaient les règlements.

SOCRATE LE JEUNE

Naturellement.

L’ÉTRANGER

Par conséquent, lorsqu’on institue des lois et des règles écrites en quelque matière que ce soit, il ne reste qu’un second parti à prendre, c’est de ne jamais permettre ni à un seul individu ni à la foule de rien entreprendre qui y soit contraire.

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