Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/362

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ÉPIDIQUE. Dieux immortels ! C’est fait de moi sans ressource !

THESPRION. Mais qu’est-ce donc ? que signifie

ÉPIDIQUE. Il m’a égorgé.

THESPRION. Qui ?

ÉPIDIQUE. Celui qui a perdu ses armes.

THESPRION. Comment ?

ÉPIDIQUE. Parce que tous les jours il m’envoyait de l’armée des lettres… mais je ferai mieux de me taire. Un esclave ne doit pas dire tout ce qu’il sait ; c’est plus prudent.

THESPRION. Par Pollux, je ne sais ce que tu redoutes. Tu trembles, Épidique, cela se voit sur ta figure. Pendant mon absence, tu auras fait quelque coup dont tu crains les suites.

ÉPIDIQUE. Ne peux-tu me laisser tranquille ?

THESPRION. Je m’en vais.

ÉPIDIQUE. Reste, je ne souffrirai pas que tu t’éloignes.

THESPRION. Pourquoi me retiens-tu, à présent ?

ÉPIDIQUE. Est-il amoureux de cette fille qu’il a achetée à la vente du butin ?

THESPRION. Belle demande ! il en est fou.

ÉPIDIQUE. Ah ! il ne me restera plus de peau sur le dos.

THESPRION. Il l’aime plus qu’il ne l’a jamais aimée.

ÉPIDIQUE. Que Jupiter t’écrase !

THESPRION. Lâche-moi maintenant ; il m’a défendu de mettre le pied à la maison ; j’ai ordre d’aller ici près, chez Chéribule, et d’attendre ; il y viendra.

ÉPIDIQUE. Pour quoi faire ?

THESPRION. Je vais te le dire : il ne veut pas que son père le rencontre ni le voie, avant qu’il ait payé la somme qu’il doit pour sa maîtresse.

ÉPIDIQUE. Ah ! quel gâchis !

THESPRION. Laisse-moi donc aller.

ÉPIDIQUE. Quand le bonhomme apprendra l’histoire, adieu ma pauvre barque !

THESPRION. Eh ! que m’importe comment tu crèves ?

ÉPIDIQUE. Je ne veux pas périr seul, je veux que tu périsses avec moi, comme deux bons amis.

THESPRION. Va te faire pendre, avec ton beau marché !

ÉPIDIQUE. Pars donc, puisque tu es si pressé.

THESPRION. Je ne me suis jamais trouvé avec personne que j’aie quitté plus volontiers. (Il sort.)

ÉPIDIQUE, seul. Le voilà parti, tu es seul maintenant ; tu vois,