Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/113

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également souverains, il y a entre le consul et le prince une sorte d’opposition : ils doivent s’attacher autant qu’il est possible, le prince à ressembler à un simple citoyen, le consul à n’y pas ressembler.

LX- Je vois d’ailleurs que la principale raison qui vous fit l’an dernier refuser le consulat, c’est que, absent, vous ne pouviez en remplir les fonctions. Aujourd’hui que vous êtes rendu à Rome et aux vœux publics, pouvez-vous, mieux qu’en l’acceptant, montrer à tous combien étaient grands les biens dont nous regrettions de ne pas jouir ? C’est peu que vous veniez au sénat, si vous ne le convoquez ; que vous assistiez aux séances, si vous ne les présidez ; que vous entendiez les votes, si vous ne les recueillez. Voulez-vous rendre à cet auguste tribunal des consuls son antique majesté, montez-y. Voulez-vous établir solidement le respect des magistrats, l’autorité des lois, le ton mesuré des requêtes ; donnez audience. Autant la république trouverait de différence, si vous étiez homme privé, à vous avoir pour consul seulement, ou pour consul et sénateur à la fois ; autant elle en trouve maintenant à vous avoir seulement pour prince, ou pour prince et consul tout ensemble. Vaincue par tant et de si fortes raisons, la délicatesse de notre prince, après une longue résistance, a cédé cependant ; mais comment a-t-elle cédé ? Il ne s’est pas fait l’égal des particuliers, ce sont eux qu’il a faits ses égaux. Il a reçu un troisième consulat, pour en donner un troisième. Il savait que la modestie, que la bienséance ne permettraient à personne d’être trois fois consul, si lui-même ne l’était une troisième fois. Cet honneur, que les princes accordaient jadis (encore bien rarement) aux compagnons de leurs guerres et de leurs périls, vous l’avez déféré à des hommes distingués sans doute, et qui avaient bien mérité de vous, mais seulement dans la paix. Le zèle de tous deux et leur vigilance vous imposaient des obligations, César ; mais il est rare, il est presque inouï qu’un prince se croie lié par les services reçus, ou, s’il croit l’être, qu’il en aime l’auteur. Vous, César, vous devez, et vous payez votre dette. Mais, en donnant des troisièmes consulats, vous pensez moins faire l’action d’un grand prince, que celle d’un ami qui n’est pas ingrat. Bien plus, en mesurant la récompense à votre fortune, vous