Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/115

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agrandissez les services les plus médiocres : il semble que vous ayez reçu autant que vous rendez. Que vous souhaiterai-je pour prix de cette bonté, si ce n’est de mériter et de devoir toujours de la reconnaissance, en sorte que l’on doute quel est le plus désirable pour vos citoyens, d’être les débiteurs ou les créanciers de votre générosité ?

LXI- Je me croyais transporté au sein de l’antique sénat, lorsque je vous voyais, à côté d’un collègue trois fois consul, prendre l’avis d’un consul une troisième fois désigné. Que ces deux hommes étaient grands alors, et que vous étiez grand vous-même ! La hauteur des corps, à quelque degré qu’elle s’élève, décroît à côté de corps qui les surpassent ; de même aussi les plus sublimes dignités s’abaissent auprès du rang où vous êtes assis, et, plus elles sont près d’atteindre à votre grandeur, plus elles semblent déchoir de celle qui leur est propre. Vous n’avez pu sans doute, malgré votre désir, élever jusqu’à vous ces nobles magistrats ; toutefois vous les avez placés si haut, qu’ils paraissaient au-dessus des autres autant que vous-même étiez au-dessus d’eux. Quand vous n’auriez donné qu’un troisième consulat pour l’année où vous reçûtes le vôtre, ce serait encore la preuve d’une grande âme : Car si c’est le privilège des heureux de pouvoir tout ce qu’ils veulent, c’est le propre des magnanimes de vouloir tout ce qu’ils peuvent. Honneur au citoyen qui a mérité d’être une troisième fois consul ! deux fois honneur au prince sous lequel il l’a mérité ! grand et mémorable est le nom de qui reçut une telle récompense ; plus grande est la gloire du rémunérateur ! Que sera-ce si, par le double présent d’un troisième consulat, vous communiquez à deux collègues à la fois la sainteté qui vous consacre ? car l’on ne peut douter qu’en prolongeant votre consulat vous n’ayez voulu surtout en embrasser deux autres, afin que plus d’un magistrat vous eût pour collègue. Ces deux consuls avaient reçu naguère cette dignité de votre père, ce qui était presque la recevoir de vous ; l’un et l’autre voyait encore devant ses yeux l’image des faisceaux qu’il venait de renvoyer ; l’un et l’autre croyait entendre résonner encore à ses oreilles le cri solennel du licteur annonçant sa présence ; et voilà de nouveau la chaise curule, de nouveau la pourpre consulaire. Ainsi autrefois, lorsque l’ennemi était aux portes, et que la