Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/55

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nificence les terres les plus éloignées, d’abréger par le bienfait les plus longues distances, de corriger le hasard, d’aller au-devant de la fortune, de tout faire en un mot pour que nul Romain, pendant la distribution de vos dons, ne sentît qu’il était homme, sans s’apercevoir aussi qu’il était citoyen.

XXVI- Autrefois, lorsque approchait le jour des largesses, on voyait des essaims d’enfants, et cette foule qui sera le peuple un jour, attendre la sortie du prince et remplir les rues sur son passage. Les pères, empressés de les montrer à sa vue, élevaient les plus petits au-dessus de leurs têtes, et leur apprenaient à bégayer des compliments flatteurs et des paroles adulatrices. Ceux-ci répétaient la prière qui leur était dictée, et la plupart en fatiguaient vainement les oreilles du prince : ignorant ce qu’ils avaient demandé, ce qu’ils n’avaient pas obtenu, ils étaient renvoyés jusqu’au temps où ils ne le sauraient que trop. Vous, César, vous n’avez pas voulu même qu’on vous priât ; et, tout agréable qu’eût été à vos regards le spectacle de cette naissante génération de Romains, tous cependant, avant de vous voir ou de vous implorer, ont été reçus et inscrits par vos ordres. Ainsi, élevés à l’aide de vos bienfaits, ils éprouvent dès l’enfance que vous êtes le père commun ; ainsi, croissant pour vous, ils croissent aux dépens de vos trésors ; ils reçoivent des aliments de vos mains, avant d’en recevoir une solde ; et tous ils doivent à vous seul autant que chacun doit aux auteurs de ses jours. Il est beau, César, de soutenir à vos frais l’espérance du nom romain. Pour un prince généreux, et qui marche à l’immortalité, il n’est pas de plus noble dépense que celle qui est faite au profit de l’avenir. De grandes récompenses et des peines proportionnées engagent doublement les riches à devenir pères. Les pauvres n’ont qu’un motif d’élever des enfants, la bonté du prince. Si celui-ci n’entretient d’une main libérale, s’il n’adopte ceux qui sont nés sur la foi de son humanité, c’en est fait de l’empire, c’en est fait de la république : il en hâte la chute, et vainement alors il protégera les grands ; la noblesse sans le peuple est une tête sans corps, qui tombera faute de soutien et d’équilibre. Il est aisé de comprendre quelle joie vous avez ressentie, en vous voyant accueilli par les acclamations des pères et des fils, des vieillards et des enfants. Le cri de la reconnaissance est le premier qu’aient fait entendre à vos oreilles ces futurs citoyens, à qui