Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

leur sol a produites, que leur soleil a nourries ; on ne les voit plus, écrasés par des charges nouvelles, manquer de forces pour acquitter les anciens tributs. Le fisc achète tout ce qu’il paraît acheter. De là viennent ces inépuisables provisions, dont le prix est fixé dans de libres enchères ; de là vient qu’on regorge ici, et que nulle part on n’est affamé.

XXX- L’Égypte, glorieuse de sa fécondité, s’est vantée de n’en rien devoir au ciel ni à la pluie ; et en effet, toujours arrosée par son fleuve, et accoutumée à s’engraisser uniquement des eaux qu’il lui apporte, elle se couvrait de si riches moissons, qu’elle semblait le disputer, sans crainte d’être jamais vaincue, aux plus fertiles contrées. Une sécheresse inattendue l’a rabaissée tout à coup au rang des plus stériles : le Nil paresseux n’avait épanché hors de son lit qu’une onde tardive et languissante ; c’était encore un fleuve immense, mais ce n’était qu’un fleuve. Aussi une grande partie des campagnes, ordinairement baignées par ses flots réparateurs, se chargèrent d’une poussière épaisse et brûlante. Vainement alors l’Égypte souhaita des nuages et leva ses regards vers le ciel, quand le père même de sa fécondité, contraint et resserré dans son cours, avait circonscrit les dons de cette année en d’aussi étroites limites que sa propre abondance. Ce fleuve, si vaste en ses débordements, s’était arrêté avant d’atteindre les collines qu’il a coutume d’envahir ; même les plaines basses ou doucement inclinées ne l’avaient reçu qu’un instant, et, au lieu de s’en retirer d’un pas lent et paisible, il s’était hâté de fuir, et de rendre à l’aridité commune des terres trop peu rafraîchies. Le pays, privé de l’inondation qui le fertilise, adressa donc à César les vœux qu’il adresse d’ordinaire à son fleuve, et ses maux ne durèrent que le temps qu’il fallut pour les lui annoncer. Votre puissance agit si promptement, César, votre bonté toujours attentive, toujours prête, pourvoit si bien à tout, que si dans votre siècle il est des malheureux, il leur suffit, pour être secourus et soulagés, que vous connaissiez leurs besoins.

XXXI- Je souhaite à toutes les nations des années abondantes et des terres fertiles ; je suis tenté de croire cependant que la fortune, en affamant l’Égypte, a voulu mesurer vos forces et faire l’essai de votre vigilance ; car lorsque vous méritez que tout seconde vos désirs, n’est-il pas évident que si