Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’autre, selon les temps et les besoins, et nourrit une nation séparée par la mer, comme si c’était une partie du peuple et des tribus de Rome. Le ciel n’est jamais assez prodigue de ses dons pour dispenser à tous les pays à la fois une égale abondance : le prince bannit à la fois de tous, non la stérilité sans doute, mais les maux qu’elle entraîne ; il y porte, sinon la fécondité, au moins les biens qu’elle procure ; il unit par de mutuels échanges l’Orient et l’Occident ; et les nations, recevant l’une de l’autre tout ce qui peut être produit ou désiré quelque part, apprennent combien les sujets de l’empire sont plus heureux sous les lois d’un seul maître que parmi les luttes qu’enfante l’indépendance. Car, tant que les biens de tous restent séparés, chacun porte séparément le poids de ses maux ; quand ils sont confondus et mis en commun, les maux individuels ne sont ressentis de personne, les biens de tous deviennent la propriété de tous. Mais, soit que chaque terre ait sa divinité particulière, ou chaque fleuve son génie protecteur, je prie la terre d’Égypte, et le Nil qui l’arrose, de se contenter de cet exemple de la libéralité impériale, et de faire qu’un sol fécondant reçoive les semences et les rende multipliées. Nous ne réclamons point d’arrérages ; peut-être cependant croiront-ils en devoir ; et, d’autant plus généreux que nous exigeons moins, ils absoudront par des années, par des siècles d’abondance, la foi trompeuse d’une seule année.

XXXIII- Vous aviez pourvu aux besoins des citoyens, aux besoins des alliés. Des spectacles ont été vus ensuite, non de mollesse et de corruption, faits pour énerver et dégrader les âmes ; mais de ceux qui encouragent aux nobles blessures et au mépris de la mort, en montrant jusqu’en des esclaves et des criminels l’amour de la gloire et le désir de vaincre. Mais quelle magnificence le prince a déployée dans ces jeux ! avec quelle justice il y a présidé, inaccessible ou supérieur à toute prévention ! Il n’a rien refusé de ce qu’on demandait ; il a offert ce qu’on ne demandait pas ; il a fait plus : il nous a invités à désirer, et, quoique avertis, nos désirs ont été devancés par plus d’une surprise. Et quelle liberté dans les suffrages publics ! quelle sécurité dans les préférences ! Personne ne fut, comme autrefois, déclaré impie pour n’avoir pas approuvé un gladiateur. Pas un spectateur, devenu spectacle à son tour, n’expia par le croc ou par les flammes de