Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/81

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qu’on vous loue de ce bienfait ; et peut-être aussi n’est-ce pas un sujet d’éloge. Mais au moins est-il agréable d’en parler, quand on se souvient de ce prince qui, subornant les esclaves contre la vie des maîtres, leur montrait les crimes qu’il voulait punir, et leur dictait ce qu’ils semblaient révéler : affreuse et inévitable calamité, que chacun devait subir autant de fois qu’il aurait des esclaves semblables à l’empereur.

XLIII- À côté de ce bienfait, plaçons la sécurité de nos testaments. Le prince n’est plus, tantôt parce qu’on l’a nommé, tantôt parce qu’on l’a omis, le seul héritier de tout le monde. Des titres faux ou iniques ne vous appellent pas aux successions ; aucun testateur, ou colère, ou dénaturé, ou furieux, ne vous prend pour complice ; ce n’est point en haine d’autrui qu’on fait mention de vous, c’est parce que vous l’avez mérité. Vous êtes nommé par vos amis, oublié par les inconnus : rien de changé depuis que vous êtes prince, si ce n’est que plus de personnes vous aiment maintenant ; vous-même aussi en aimez un plus grand nombre. Continuez, César, à marcher dans cette route ; l’expérience fera voir lequel vaut mieux pour augmenter, je ne dis pas seulement la renommée du prince, mais ses trésors, que les citoyens éprouvent le désir ou subissent la nécessité de l’avoir pour héritier. Beaucoup de bienfaits ont été répandus par votre père, beaucoup par vous-même : il peut mourir un ingrat, quelqu’un reste pour jouir de ses biens ; tout ce qui vous en revient à vous, c’est de la gloire : car si la reconnaissance rend la générosité plus agréable, l’ingratitude en rehausse l’éclat. Mais quel prince avant vous a mis cette gloire au-dessus des richesses ? quel est celui qui dans nos patrimoines, n’a pas regardé comme à lui le bien même qui nous venait de lui ? Les présents des Césars n’étaient-ils pas, comme ceux des rois, des hameçons cachés sous l’appât, des pièges recouverts d’une amorce trompeuse, lorsque, saisis, pour ainsi dire, par les fortunes privées, ils s’enlaçaient avec elles, et entraînaient en se retirant tout ce qu’ils avaient touché ?

XLIV- Oh, qu’il est utile d’arriver à la prospérité à travers les disgrâces ! vous avez vécu parmi nous ; comme nous, vous avez connu les périls, ressenti les alarmes ; c’était alors toute la vie des gens de bien. Vous savez par expérience combien les mauvais princes sont en horreur à ceux même qui les ren-