Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/97

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continuité des sièges, rien ne sort du niveau ; point de tribune qui soit plus exclusivement destinée à César que le spectacle même. Ainsi vos citoyens pourront vous voir comme vous les verrez. Il leur sera permis de contempler, non plus la chambre du prince, mais le prince en personne, assis au milieu du peuple, de ce peuple auquel vous avez donné cinq mille places de plus. Aussi bien vos généreuses largesses avaient accru le nombre de ceux qui le composent ; et vous avez voulu qu’il s’accrût encore sur la foi de votre libéralité.

LII- Si un autre avait un seul de ces titres glorieux, depuis longtemps on le verrait, la tête couronnée de rayons, briller en or ou en ivoire parmi les immortels ; et il n’y aurait pour lui ni autels trop augustes, ni victimes trop grandes. Vous, César, vous n’approchez des dieux que pour les adorer ; vous tenez à honneur que vos statues fassent la garde devant les temples et en bordent l’entrée. Ainsi les dieux conservent sur la terre les honneurs souverains, puisque vous n’ambitionnez point les honneurs des dieux. Votre image se voit, une ou deux fois seulement, dans le vestibule de Jupiter très bon et très grand ; encore n’êtes-vous représenté qu’en bronze ; tandis que naguère toutes les avenues, tous les degrés, tout le parvis du temple, étincelaient d’or et d’argent, ou plutôt en étaient souillés ; alors que, mêlés parmi les statues d’un prince impur, les simulacres des dieux avaient perdu leur majesté. Aussi ces simples bronzes, si peu nombreux, subsistent et subsisteront tant que durera le temple ; au lieu que ces innombrables statues d’or ont servi, en tombant, de victimes à la joie publique. On aimait à briser contre terre ces visages superbes, à courir dessus le fer à la main, à les rompre avec la hache, comme si cette matière eût été sensible, et que chaque coup eût fait jaillir le sang. Personne ne fut assez maître de ses transports et de sa tardive allégresse pour ne pas goûter une sorte de vengeance à contempler ces corps mutilés, ces membres mis en pièces ; à voir ces menaçantes et horribles images jetées dans les flammes et réduites en fusion, afin que le feu tournât à l’usage et au plaisir des hommes ce qui les fit si longtemps frissonner d’épouvante. C’est aussi par respect pour les dieux que vous ne souffrez pas, César, que nos actions de grâces soient adressées à votre bonté en présence de votre génie tutélaire ; vous voulez qu’elles le soient