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LIVRE HUITIÈME.


la contemplation ; qu’elle détourne la contemplation plus ou moins vers les choses extérieures selon qu’elle est accomplie nécessairement ou librement ; qu’en tout cas, elle a toujours la contemplation pour fin dernière[1]. Mais nous traiterons ce sujet plus loin [§ 4-7].

Commençons par expliquer quelle peut être la nature de la contemplation [de la pensée] que nous attribuons à la terre, aux arbres et aux plantes [ainsi que nous l’avons dit plus haut], de quelle manière se ramènent à l’acte de la contemplation les choses que ces êtres produisent et engendrent ; comment la Nature, que l’on regarde comme privée de raison et d’imagination, est cependant elle-même capable d’une espèce de contemplation, et produit toutes ses œuvres en vertu de la contemplation, que cependant elle ne possède pas [à proprement parler].

I. La Nature n’a évidemment ni pieds, ni mains, ni aucun instrument naturel ou artificiel. Pour produire, il ne lui faut qu’une matière, sur laquelle elle travaille et à laquelle elle donne une forme. Les œuvres de la Nature excluent toute idée d’opération mécanique : ce n’est pas par voie d’impulsion, ni en employant des leviers et des machines, qu’elle produit les couleurs variées, qu’elle façonne les contours des objets. En effet, les ouvriers mêmes

  1. M. Steinhart, en citant ce passage, fait remarquer avec juste raison que ce livre de Plotin est un de ceux où se manifeste le plus l’originalité de son génie : « Profecto et Platone et Aristotele rectius Plotinum sæpe cognovisse videmus, quem ad finem singula quæque in mundo creata sint et quo omnia rerum mundanarum genera tendant, ita ut interdum divinatione aliqua jam præcepisse videatur multa, quæ de divina ratione universæ rerum naturæ insita recentissima demum ætas melius intellexit. » (Meletemata plotiniana, p. 19.) M. Steinhart ajoute en note : « Abundant duo potissimum libri (Enn. III, VIII ; Enn. VI, VII) aureis vere dictis de Naturæ consilio, quæ lumine suo reconditam nobis divinam sapientiam aperire videntur. Nam quid unquam de Natura rectius dictum est, quam istud : Omnia contemplationem appetunt, etc. ? »