Page:Plotin - Ennéades, t. II.djvu/314

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
264
QUATRIÈME ENNÉADE.


montre clairement que nous suivons le mouvement circulaire du ciel, que nous en recevons nos mœurs et notre condition, qu’ayant été engendrés dans l’univers, nous devons tenir notre âme de l’univers qui nous renferme[1], et que, puisque chaque partie de nous participe de notre âme, nous devons nous-mêmes participer de l’Âme de l’univers, dont nous sommes des parties de la même manière que nos membres sont des parties de nous-mêmes. Enfin, ils citeront encore ces mots : « L’Âme universelle prend soin de tout ce qui est inanimé[2]. » Cette phrase paraît signifier qu’il n’y a point d’âme en dehors de l’Âme universelle : car c’est elle qui prend soin de tout ce qui est inanimé.

II. Voici ce qu’il faut répondre à de pareilles assertions. D’abord, en posant que les âmes sont conformes (ὁμοειδῆ),

    si notre corps est nourri par celui de l’univers, ou si celui-ci tire du nôtre sa nourriture, et s’il en a reçu et en reçoit ce qui entre, comme nous l’avons dit, dans la composition du corps ? Protarque. Cette question, Socrate, n’a pas besoin de réponse… Socr. Ne dirons-nous pas que notre corps a une âme ? Prot. Oui, nous le dirons. Socr. D’où l’aurait-il prise, mon cher Protarque, si le corps de l’univers n’est pas lui-même animé et s’il n’a pas les mêmes choses que le nôtre et de plus belles encore ? Prot. Il est clair, Socrate, qu’il ne l’a point prise d’ailleurs. » (Philèbe, p. 29 ; t. II, p. 345 de la trad. de M. Cousin.)

  1. Plotin fait ici allusion à un passage du Phèdre (p. 246-248 ; t. VI, p. 48-55 de la trad. de M. Cousin), dans lequel il est dit que l’âme humaine suit le mouvement circulaire des astres tant qu’elle est parfaite, et vient ensuite habiter un corps terrestre quand elle a perdu ses ailes. Plotin dit encore (t. I, p. 178), en parlant d’un passage du Timée (cité t. I, p. 468-470) : « Par ces paroles, Platon semble dire que nous sommes asservis aux astres, que nous en recevons nos âmes, qu’ils nous soumettent à l’empire de la nécessité quand nous venons ici-bas, que c’est d’eux que nous tenons nos mœurs, et, par nos mœurs, les actions et les passions qui dérivent de la partie passive de l’âme. »
  2. Voy. le passage du Phèdre cité ci-dessus, p. 89, note 2.