Page:Plutarque - Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 1, 1870.djvu/708

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lui faisant une cour assidue, demanda-t-il sa main. Il promettait, s’il devenait son époux, d’adopter Battus pour fils et de partager le trône avec lui. Eryxo, c’était le nom de cette princesse, après avoir pris conseil de ses frères, autorisa Laarque à s’aboucher avec eux, comme si pour sa part elle acceptait ce mariage. Laarque s’adressa donc aux frères ; mais à dessein ils traînaient en longueur, et suscitaient des retards. Alors Eryxo envoya auprès de Laarque une de ses esclaves chargée de lui dire : « Que ses frères, à la vérité, élevaient pour le moment des oppositions, mais qu’ils cesseraient toute résistance et donneraient leur consentement si Laarque et elle avaient ensemble un commencement de relations ; que si donc il le voulait bien, il eût à se rendre près d’elle pendant la nuit, et qu’une fois l’affaire commencée le reste marcherait au mieux. » C’était mettre Laarque au comble de la joie. La proposition amoureuse de la jeune femme le fit donner tête baissée dans le piége ; et il promit de venir dès qu’elle aurait commandé. Eryxo s’était en tendue en cela avec Polyarque, l’aîné de ses frères. Le moment est déterminé pour un rendez-vous, et Polyarque est en secret introduit dans l’appartement de sa sœur avec deux jeunes gens armés d’épées. C’étaient des fils ardents à venger le trépas de leur père mis précisément à mort depuis peu sur l’ordre de Laarque. Eryxo l’ayant donc envoyé chercher, il arriva sans aucun de ses satellites. Les jeunes gens le tuèrent de leurs épées, et son cadavre fut jeté par-dessus les remparts. On fit alors paraître Battus. Il fut déclaré roi en vertu des titres qu’il tenait de ses pères[1], et Polyarque rendit aux Cyrénéens leur ancienne forme de gouvernement. Cependant il se trouvait alors dans Cyrène un grand nombre de soldats d’Amasis. Ils étaient dévoués à Laarque, et pour la ville c’était le sujet d’alarmes sérieuses. Ces soldats députèrent vers Amasis quelques-uns d’entre eux, chargés de lui apprendre la conduite de Polyarque et d’Eryxo. Il entra dans une grande fureur. Déjà il songeait à déclarer

  1. Amyot : « déclaré roy à la mode et coustume du païs. »