Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 13.djvu/33

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proposée, qu'ils n'eurent pas un seul mot à lui opposer. Les tribuns firent de nouvelles tentatives, et citèrent les consuls devant le peuple. Mais Cicéron, sans rien craindre, se fit suivre par le sénat ; et, se présentant à la tête de son corps, il parla avec tant de force que la loi fut rejetée, et qu'il ôta aux tribuns tout espoir de réussir dans d'autres entreprises de cette nature : tant il les subjugua par l'ascendant de son éloquence !

XIII. C'est de tous les orateurs celui qui a le mieux fait sentir aux Romains quel charme l'éloquence ajoute à la beauté de la morale ; de quel pouvoir invincible la justice est armée, quand elle est soutenue de celui de la parole. Il leur montra qu'un homme d'État qui veut bien gouverner doit, dans sa conduite politique, préférer toujours ce qui est honnête à ce qui flatte ; mais que dans ses discours, il faut que la douceur du langage tempère l'amertume des objets utiles qu'il propose. Rien ne prouve mieux la grâce de son éloquence que ce qu'il fit dans son consulat, par rapport aux spectacles. Jusqu'alors les chevaliers romains avaient été confondus dans les théâtres avec la foule du peuple ; mais le tribun Marcus Othon, pour faire honneur à ce second ordre de la république, voulut les distinguer de la multitude,