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L’IMAGE VOILÉE DE SAÏS.

Un jeune homme que la soif de la science entraînait à Saïs en Égypte, pour apprendre la sagesse secrète des prêtres, avait parcouru rapidement plusieurs degrés du savoir ; son esprit inquiet le poussait toujours plus loin et l’hiérophante pouvait à peine modérer l’ardeur de l’impatient disciple.

— Qu’ai-je donc, s’écriait-il, si je n’ai pas tout ? la science souffre-t-elle le plus et le moins ? ta vérité est-elle comme la fortune qui se distribue en parts inégales, et que l’on possède en grandes ou petites parcelles ? Ta vérité n’est-elle pas une et indivisible ? Prends un accord dans une harmonie ! prends une couleur dans l’arc-en-ciel ! ce qui te reste n’est rien tant que tu ne réunis pas l’ensemble des sons et l’ensemble des nuances.

Ils s’entretenaient ainsi dans une enceinte silencieuse et solitaire, où une image voilée et gigantesque frappa les regards du jeune homme ; il la contemple stupéfait et s’écrie : — Qu’y a-t-il donc derrière ce voile ? — La vérité. — Quoi ! dit-il, c’est la vérité