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LE CHEVALIER TOGGENBOURG.

« Chevalier, mon cœur vous offre une affection de sœur ; n’exigez pas une autre tendresse, car vous m’affligeriez. Paisible je vous vois venir, paisible je vous vois vous éloigner. Je ne comprends pas les larmes de vos yeux. »

Il écoute ces paroles avec une douleur muette, s’arrache, le cœur sanglant, d’auprès d’elle, la presse avec ardeur dans ses bras, puis s’élance à cheval, rassemble ses vassaux dans son pays de Suisse, et, la croix sur la poitrine, il part avec eux pour la terre sainte.

Là, le bras du héros accomplit de hauts faits : le cimier de son casque flotte au milieu des légions ennemies : le nom de Toggenbourg est la terreur du musulman. Mais rien ne peut guérir la plaie de son cœur.

Pendant une année il a supporté sa douleur ; il ne peut la soutenir plus longtemps. Hors d’état de trouver le repos auquel il aspire, il quitte l’armée, aperçoit sur les rives de Joppé un navire dont les voiles s’enflent, et s’embarque pour le pays où respire celle qu’il aime.