Page:Poésies de Schiller.djvu/78

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la forêt ; tout à coup des meurtriers s’avancent et l’arrêtent. Il veut combattre ; mais bientôt sa main retombe fatiguée, car elle est plus habituée à tendre les cordes légères de la lyre que celles de l’arc vigoureux.

Il appelle à son secours les hommes et les Dieux : ses cris sont inutiles. Aussi loin que sa voix peut s’étendre, il n’existe pas un être humain. « Hélas ! s’écrie-t-il, il faut donc que je meure ici de la main de deux misérables, sur ce sol étranger où personne ne me pleurera, où personne ne viendra me venger. »

À ces mots il tombe couvert de blessures. Au même moment les cigognes passent ; il entend leurs cris aigus et ne peut plus les voir ; mais il leur dit : « Si nulle autre voix ne s’élève pour venger ma mort, la vôtre du moins accusera mes meurtriers. » Il dit et meurt.

On retrouva un cadavre dans la forêt ; et quoiqu’il fût défiguré, celui qui devait recevoir Ibicus à Corinthe reconnut ses traits chéris. « Est-ce donc ainsi, dit-il, que je devais te retrouver, moi qui espérais te voir porter glorieusement la couronne de laurier ? »

Tous les étrangers réunis à la fête de Poseidon déplorent la perte d’Ibicus ; toute la Grèce en est émue. Chaque cœur le regrette, et le peuple se rassemble au Prytanée et demande avec colère à ven-