Page:Poésies de Schiller.djvu/90

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un fort cheval : en traversant un vallon il entend de loin le son d’une clochette ; c’était un prêtre qui s’en allait à pied, précédé de son sacristain, porter à un malade le corps de Notre-Seigneur.

« Le comte se découvre humblement la tête, et s’incline jusqu’à terre pour rendre hommage en bon chrétien à celui qui a sauvé les hommes. À travers la vallée coulait un ruisseau qui, grossi par les ondes d’un torrent, arrêtait les pas du prêtre. Il devait porter sur l’autre rive le saint sacrement ; il ôte sa chaussure et se prépare à traverser le ruisseau.

« Que fais-tu ? lui dit le comte qui le regarde avec surprise. ─ Seigneur, je dois me rendre auprès d’un mourant qui languit après la nourriture céleste ; le torrent a renversé le pont qui s’élevait sur le ruisseau ; pour aider au salut du malade, je vais passer cette eau pieds nus. »

« Le comte le fait asseoir sur son noble cheval, et lui remet entre les mains ses rênes brillantes, pour qu’il puisse sans retard accomplir son pieux devoir et soulager le malade. Puis, montant sur le cheval de son écuyer, il s’en va gaiement continuer sa chasse. Le prêtre, ayant rempli sa mission, vient le lendemain remercier le comte et lui ramène modestement son cheval par la bride.

« À Dieu ne plaise ! dit le comte avec humilité,