Page:Poe - Nouvelles Histoires extraordinaires.djvu/299

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on insista fortement, et qui ne servit pas peu à diminuer la terreur. Les théologiens, avec un zèle enflammé par la peur, insistèrent sur les prophéties bibliques, et les expliquèrent au peuple avec une droiture et une simplicité dont ils n’avaient pas encore donné l’exemple. La destruction finale de la terre devait s’opérer par le feu, — c’est ce qu’ils avancèrent avec une verve qui imposait partout la conviction ; — mais les comètes n’étaient pas d’une nature ignée, et c’était là une vérité que tous les hommes possédaient maintenant, et qui les délivrait, jusqu’à un certain point, de l’appréhension de la grande catastrophe prédite. Il est à remarquer que les préjugés populaires et les vulgaires erreurs relatives aux pestes et aux guerres, erreurs qui reprenaient leur empire à chaque nouvelle comète, furent cette fois choses inconnues. Comme par un soudain effort convulsif, la raison avait d’un seul coup culbuté la superstition de son trône. La plus faible intelligence avait puisé de l’énergie dans l’excès de l’intérêt actuel.

Quels désastres d’une moindre gravité pouvaient résulter du contact, ce fut là le sujet d’une laborieuse discussion. Les savants parlaient de légères perturbations géologiques, d’altérations probables dans les climats et conséquemment dans la végétation, de la possibilité d’influences magnétiques et électriques. Beaucoup d’entre eux soutenaient qu’aucun effet visible ou sensible ne se produirait, — d’aucune façon. Pendant que ces discussions allaient leur train, l’objet lui-même s’avançait progressivement, élargissant visiblement son diamètre et augmentant son éclat. À son approche, l’Humanité pâlit. Toutes les opérations humaines furent suspendues.

Il y eut une phase remarquable dans le cours du sentiment général ; ce fut quand la comète eut enfin atteint une grosseur qui surpassait celle d’aucune apparition dont on eût gardé le souvenir. Le monde alors, privé de cette espérance traînante, que les astronomes pouvaient se tromper, sentit toute la certitude du