Page:Poictevin - Ludine, 1883.djvu/69

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gnards, moins adorateurs de leur petite personne despote. À cette marmaille elle eut souhaité un peu de tenue. Des rudesses même l’eussent séduite, dans le gouvernement premier de la vie.

C’est qu’aux airs tendres elle trouvait sans peine une tendance à s’avachir. Les roucoulements de tous les amours lui étaient insipides. Au fond, selon elle, le monde méritait qu’on le rebâtit sur d’autres fondements. Tous les autres divertissements seraient plus réjouissants que l’amour. De celui-ci on n’userait que par accident.

Non cependant qu’elle se sentit portée vers les fiers à bras, les bien découplés, ceux qui sans gonflure creuse gardent des grâces. Elle préférait les timides qui savent rougir. Aux autres, elle en voulait de sembler ne pas douter de la conquérir. Pour ne lui point déplaire, il fallait qu’on lui témoignât cette discrétion d’expectative, et alors lui venait cette sensation qu’elle aurait quelque mérite peut-être à s’avancer, même à se pencher vers cette sorte d’hommes. Marque de supériorité vis à vis eux, d’une gratuité protectrice, et dans ce cas seulement eut pu s’épanouir en elle la fleur d’amour.

Et elle ne se jugeait pas une courtisane. C’étaient les hommes, qui méritaient le nom de courtisans. Elles, on devrait les appeler des courtisées.