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L’AFFAIRE MALVY

à propos de l’affaire Malvy. « Si mon ministère, me dit-il, est mis en cause, je prendrai le Sénat lui-même à partie à propos des affaires Humbert et Gervais. » Il ajoute très sérieusement qu’il est écœuré de la politique et qu’il attend la fin de la guerre pour donner sa démission de député. Persistera-t-il dans cette intention ?

Dalimier vient, à son tour, me déclarer que l’affaire Malvy serait une faute capitale, qu’elle ferait le plus grand mal au pays. Il voudrait que Clemenceau intervînt discrètement auprès de la Commission de la Haute Cour pour qu’il n’y eût pas renvoi. Je lui réponds que le gouvernement ne peut, ni ne doit intervenir dans une affaire judiciaire et que, d’ailleurs, Clemenceau n’y paraît point disposé.

Delanney, qui part pour Tokio par l’Amérique, me fait ses adieux.

Paléologue me raconte qu’un sous-secrétaire d’État, Lemery, affirme qu’en septembre prochain Clemenceau sera usé, remplacé et qu’on fera la paix. Il ajoute qu’on commence à attaquer Clemenceau, à lui reprocher ses visites perpétuelles et trop bruyantes aux armées, les communiqués trop optimistes sur ses tournées, l’affaire Sixte, etc. Il ajoute qu’il a reçu ces jours-ci M. Louis Dreyfus et que celui-ci lui a annoncé que Clemenceau lui avait donné une mission politique et diplomatique en Russie. M. Dreyfus disait lui-même : « Je ne me crois pas qualifié pour ce rôle ; je suis Juif, je suis négociant en grains : deux raisons pour ne pas être très bien vu des paysans russes. J’ai fait ces objections à Clemenceau, il n’en a pas tenu compte. »

En Conseil des ministres, ce matin 28 mai, Pams rapporte que Longuet voulait poser une question au gouvernement et interpeller sur l’expulsion d’un journaliste.