Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 10, 1933.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
22
LA VICTOIRE

desquelles il résulte que satisfaction nous est refusée : sur la question de la Belgique, sur la question de l’Alsace-Lorraine, sur la question de l’évacuation des territoires occupés, sur la question de la réparation des dommages, sur la question du droit des nationalités de s’affranchir de la domination étrangère, droit qui s’applique, en Europe, aux populations italiennes, serbes, yougo-slaves, roumaines, polonaises et tchéco-slovaques et, en Asie, à toutes les populations persécutées de l’Empire Ottoman.

Nous sommes en outre informés par le discours du comte Hertling que, dans la pensée de nos ennemis, la liberté des mers impliquerait « l’abandon des points fortifiés pour les flottes sur les voies internationales importantes, comme celles qu’entretient l’Angleterre à Gibraltar, à Malte, à Aden, à Hong-Kong, aux îles Falkland et en plusieurs autres endroits », alors que, d’autre part, en ce qui concerne la liberté des Détroits et l’organisation future des colonies dans toutes les parties du monde, les formules les plus équivoques et les plus menaçantes sont employées.

Peut-on dire que, sur d’autres points, les vues de l’ennemi se soient rapprochées des nôtres et que, pour l’avenir, il se montre sincèrement disposé à renoncer à l’opposition systématique qui, dans le passé, est toujours venue de lui contre les propositions qui tendaient à rendre la guerre moins inhumaine et autant que possible à la conjurer ? Il faudrait pour cela qu’il consentît à se réformer profondément lui-même, à se constituer à l’intérieur suivant les principes de liberté qui donnent aux peuples le moyen de disposer d’eux-mêmes, à supprimer son régime de domination militaire, à faire que son gouvernement soit l’expression de la nation et non le privilège d’une caste.

La « Société des Nations », qui est l’idéal des peuples épris de liberté et de justice, n’est concevable que pour ceux qui ont renoncé à toute pensée de domination et qui ont atteint leur plein affranchissement.

Devant les déclarations qui nous sont faites et qui