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un cheval, qui nous conduit à la lisière nord-est. Nous y trouvons des éléments du 9e régiment de cuirassiers à pied, qui s’est admirablement comporté dans la défense de Piémont. Nous allons à travers bois jusqu’à la lisière nord, où nous visitons les premières lignes. Pas de tranchées, tant le sol est humide. Tous les travaux sont en superstructure. Nous sommes sur la rive droite de la Tourbe, et sur la rive gauche, le bois de Ville est occupé par l’ennemi. Tout est, du reste, au calme. Notre wagonnet nous ramène à nos autos qui nous conduisent à la cote 202, où nous trouvons le général Lebouc et d’où nous découvrons tout le panorama de la Main de Massiges. De là, par une route nouvelle ouverte par le génie, à laquelle Gouraud me demande la permission de donner mon nom, nous allons à l’observatoire du Balcon que j’ai déjà visité autrefois sous les obus avec le général de Langle de Cary. La physionomie des lieux est un peu changée. Les petits bois sont dévastés ; les abris de l’observatoire ont été améliorés. L’ennemi tire toujours, du reste, sur les batteries que nous avons près de là et les obus sifflent de nouveau. Nous descendons au nord du Balcon, par des boyaux, jusqu’aux tranchées de la ligne de résistance et nous faisons une assez longue tournée au milieu des hommes. Au retour, Gouraud me dit avec amabilité que je n’ai pas assez parlé à ses soldats. Peut-être a-t-il raison ? mais j’ai toujours peur de provoquer des réclamations auxquelles je n’ai pas le droit de répondre et je suis figé par mon absence d’autorité. Gouraud me ramène à Châlons. J’y reprends mon train et je vois entre Épernay et Château-Thierry se succéder les ruines dans le jour qui tombe.


Mardi 27 août.

Conseil des ministres.