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partie détruit par les canons et les avions. Lebrun avait donné rendez-vous au préfet et au sous-préfet. Il s’est entendu avec eux pour assurer prochainement le retour de la population. Le château est endommagé sur plusieurs points. La ville, dévastée, est d’une tristesse lugubre. Puis, par Coudun, aussi très endommagé et en partie détruit. Entre les communes, les terres sont bouleversées par les obus et semées de munitions allemandes. Lorsque nous arrivons à Lassigny, nous cherchons la ville, nous y sommes et ne la trouvons pas : des trous, des pierres accumulées et les restes épars d’un tremblement de terre.

Beuvraignes, Crapeaumesnil, autant de monceaux sans nom. À Roye, je retrouve la place où j’ai décoré le maire, au milieu d’une foule si joyeuse de revoir ses Français. Et maintenant, toutes les maisons sont détruites et les habitants partis. Sera-t-il possible de faire revivre ce malheureux coin de pays ? Nous avions songé un instant à prendre le repas froid que nous avons apporté, dans les ruines d’une maison où il restait encore deux tables et quelques chaises couvertes de poussière ; mais l’odeur des décombres, le souvenir encore frais des Allemands nous ont chassés et nous allons déjeuner à Laucourt, au milieu d’une compagnie de poilus enchantés de nous accueillir.

Nous nous sommes ensuite arrêtés à Tilloloy, au milieu d’autres soldats, qui réunissaient leurs trophées, canons, mitrailleuses, casques, fusils, munitions, et qui avaient dans les yeux une fierté rayonnante.

Par d’autres ruines, Conchy, Orvillers, etc., nous sommes venus à Clermont, où le général Humbert nous dit qu’il interdira encore l’entrée de Noyon qu’il croit miné, et que ses divisions, très fatiguées par leurs attaques continues, ren-