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THIAUCOURT

tible. La crête passée, nous descendons sur Thiaucourt. La route redevient bonne. Les arbres qui la bordent sont en grande partie intacts. Voici de gros tanks français qui viennent à notre rencontre avec un bruit de moteurs et de chaînes. Les éclatements se rapprochent, mais aucun projectile ne tombe sur l’agglomération d’hommes dont nous sommes entourés. Dans le vallon, avant Thiaucourt, se trouve une voie de soixante centimètres installée par les Allemands et un matériel de chemin de fer intact, capturé par les Américains. Nous arrivons à Thiaucourt. Un pont miné par les Allemands est interdit et nous sommes forcés de faire un détour. La ville est déjà très endommagée et continue à l’être de plus en plus par le bombardement ennemi. Nouveaux photographes américains qui nous prennent, ma femme et moi, pendant notre arrêt de quelques minutes.

Nous revenons alors par la route de Regnieville, mais au bout de quelques centaines de mètres notre pilote nous prévient qu’à cause de l’encombrement des convois, il faut quitter cette route et passer à travers champs. À cause des ornières, la marche des autos devient impossible. Nous descendons pour alléger les voitures et nous faisons à pied un long trajet au milieu du va-et-vient un peu désordonné des troupes américaines. L’heure passe. Quand arriverons-nous à Bois-l’Évêque ? Le crépuscule commence déjà. Nous filons maintenant par Flirey dans la direction de Toul, où nous arrivons à sept heures et demie du soir. Nous nous arrêtons devant la gare. Challe, qui est arrivé ce matin à Commercy et qui nous a suivis toute la journée avec Herbillon, descend pour faire prévenir le train à Commercy que nous n’y arriverons qu’assez tard. Encore une demi-heure avant d’être à Bois-l’Évêque. Il fait tout à fait nuit. Nous roulons entre deux files de baraquements sombres.