Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/330

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corps suffirait, à lui seul, pour prendre l’offensive à l’aile gauche, mais il s’est mal engagé et tout est à recommencer. Il faut maintenant trois jours pour que les autres troupes soient en place. Dès qu’elles y seront, on tâchera de balayer les Allemands à l’ouest. Les 60 000 territoriaux que commande le général Brugère, et qui sont retranchés près d’Amiens, marcheront vers Cambrai, dès que l’armée Castelnau sera elle-même en mesure de combattre. Ces 60 000 territoriaux sont flanqués de la brigade de cavalerie qui est sous les ordres du général Beaudemoulin, mon ancien secrétaire général militaire. L’armée Castelnau se compose du IVe corps et d’une division marocaine, du XIIIe corps et d’une autre division marocaine, du XIVe corps, du XXe et de deux divisions de cavalerie. Le XIVe corps doit débarquer à Saint-Just-en-Chaussée et le XXe au sud d’Amiens. Ils glisseront ensuite dans la direction de l’Oise pour prendre l’ennemi par le flanc. Mais trois jours, c’est un siècle et, dans l’intervalle, que de surprises les Allemands ne peuvent-ils pas encore nous réserver !

Joffre a télégraphié à Millerand qu’ils paraissent décidés à faire, dans cette prochaine bataille, un effort considérable, mais il préfère, dit-il, qu’elle soit livrée sur l’Aisne plutôt que dans l’Est, parce que, si les armées françaises avaient dû pousser l’ennemi jusqu’à la Meuse, la destruction de beaucoup de travaux d’art aurait rendu moins faciles pour nous les transports de troupes et le ravitaillement. Pour cette raison, et parce que le G. Q. G. juge la situation stratégique favorable, le colonel Pénelon me répète que Joffre se félicite toujours d’avoir « contraint » les Allemands à s’arrêter sur