Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/431

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au front ; en face, des soldats belges un peu plus nombreux. À notre arrivée, la musique belge joue la Marseillaise ; la musique française répond par la Brabançonne. Aux fenêtres et tout autour de la place, la foule se presse et pousse des vivats répétés en l’honneur de la France et de la Belgique. Le roi et moi, nous passons les troupes en revue. À la pensée qu’elles sont là, si dignes et si tranquilles, entre deux combats, j’ai peine à contenir mon émotion. Nous entrons ensuite à l’Hôtel de ville et, par un vieil escalier en colimaçon, nous montons à la grande salle du Conseil communal de Fumes. Le roi me fait remarquer de modestes fleurs d’arrière-saison qu’on a, me dit-il, demandées au seul horticulteur qui exerce encore son métier dans la région. Un grand feu flambe dans l’immense cheminée. Nous causons quelques instants debout, le roi, Millerand, Joffre et moi ; nous parlons du passé, du présent, de l’avenir. Furnes n’est-elle pas devenue pour la Belgique une sorte de capitale provisoire, où se maintiennent les traditions nationales et où se préparent les revanches futures ? Du haut des clochers de Saint-Nicolas et de Sainte-Walburge, le regard n’em-brasse-t-il pas la vaste plaine où se jouent, avec les destinées de la nation belge, celles de la France et de l’humanité ?… Je quitte à regret cette ville symbolique, où mon cœur a si fortement battu. Le roi tient à me reconduire en auto jusqu’à la frontière. Pendant tout le trajet, il me renouvelle les assurances de sa fidélité à notre cause commune. Je lui réitère l’expression de mon dévouement et de mon admiration.

En quittant le roi, nous partons pour Cassel, quartier général de Foch. Sur la route, nous nous