Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/440

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D’après M. Maurice Bompard, cette agression est le fait d’officiers et de marins allemands2. Les trois ambassadeurs alliés en Turquie ont pensé qu’il convenait de déclarer immédiatement à la Porte que si elle ne congédiait pas sur-le-champ les militaires et matelots étrangers, elle assumerait par là même la responsabilité de l’acte de guerre dont ils viennent de se rendre coupables. Delcassé a, d’accord avec Londres, approuvé cette démarche de nos représentants. Mais, avant de se concerter avec nous, M. Sa-zonoff avait déjà prescrit à son ambassadeur de demander ses passeports. Il a ensuite proposé la remise d’une note collective plus sèche que celle des ambassadeurs, avec sommation de renvoyer la mission allemande dans les vingt-quatre heures. À vrai dire, le grand vizir avait ignoré les projets des Allemands ; mais Enver Pacha les avait connus3. Les mêmes attaques germaniques, exécutées sous pavillon turc, se sont renouvelées à Théodorie et à Sébastopol. C’est l’aboutissement de toutes les intrigues ourdies par Guillaume II à Constantinople depuis la mission Liman von Sanders. Le gouvernement russe envisage cependant avec beaucoup de sang-froid les complications qui vont s’ensuivre. « Pas un homme, a dit M. Sazonoff à M. Paléologue, ne sera distrait du front européen. Avant tout, il faut vaincre l’Allemagne, dont la défaite entraînera la ruine de la Turquie. La Russie réduira donc au minimum la défense qu’elle opposera aux attaques de la